- Oui, je me souviens de mon mariage, en juillet 1959.
- Mais tu étais déjà enceinte alors ?
- Oui, je me suis mariée enceinte. J'avais une jolie robe beige, avec des cerises et des fraises, que ma mère m'avait faite.
C'est toujours difficile.
Oui, toujours aussi dur de la voir.
Se tenir n'importe comment, parler, disjoncter. Être obligée de lui rappeler que non, on ne mange pas avec les doigts, et que oui, il faut couper.
Les raccourcis de la pensée sont cruels. Je la regarde, je m'imagine moi plus tard. Si je deviens comme ça, je préfère mourir.
Et je revois les petites jupes droites, le tailleur cousu main, les escarpins tout fins, le chignon banane, et son sourire.
Surtout son sourire, le même, exactement le même.
La tendresse de ses mains.
Tata Anne-Marie me l'a dit : "Elle était très belle, magnifique".
Et moi, je me croise parfois dans une glace, et ce sourire là, ça me cogne au cœur. Un uppercut à couper le souffle.
Le miroir brisé.
Quarante années de malheur, et + si affinités...
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- Elle est si vivante, je l'aime beaucoup.
Il a dit ça, avec son accent anglais.
Ils disent tous ça, qu'elle est vivante. Qu'elle les fait rire, oublier le moche du quotidien.
Et moi, ça me fait toujours quelque chose, parce que bien sûr c'est toute cette douleur qui envahit tout, et occulte le reste.
Le reste, oui, quand même, c'est ça qui reste.
Que j'ai reçu.
Le sourire, les rires, les chansons, et la tendresse.
les trucs qui font qu'un jour, on bascule du bon côté.
Le côté vie.
coline je serre fort ta main dans la mienne ....
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