lundi 11 novembre 2013

Week-end plus size #1

Samedi soir,
après l'atelier voix, la répé du concert de Noël, la veillée,
j'ai dormi au domaine.
Pas exactement sur mes terres.
Sur celles d'Embraud.
C'était étrange d'y dormir seule. Je crois bien que c'était la première fois.
Le matin,  c'était vue sur l'horizon, entre l'herbe et l'eau.



La vieille maison désertée.


Pas âme qui vive, l'écho des rires et des chansons effleurent le silence.

La salle vide,
sur le tancarville les torchons que j'ai étendus hier soir ont séché près du poêle.
Il reste trois parts de tarte aux pommes.
Torchons.
Pommes.
Il y a eu veillée ici hier soir.
Et maintenant c'est tout calme, avec la joie qui flotte encore un peu.


L'incessante pluie de ces derniers jours a fait gonfler l'Allier.



D'ailleurs, il pleut de nouveau, et à seaux
quand je prends le volant pour aller à la piscine.
En sortant du centre aqualudique (la piscine, ça s'appelle comme ça maintenant) je bifurque vers le centre hospitalier.
Paty la Rouge respire seule.
Bien sûr que la trachéo, le crâne rasé, les yeux fermés, ça peut être impressionnant.
Bien sûr que ce serait mieux de ne garder d'elle que ses cheveux en mèches folles et son regard maquillé, la bourrée deux temps sans enlever le tablier, et les rires aux éclats, les tables qu'on essuie et les petits-déjeuners qu'on prépare.
Bien sûr que je suis traversée de questions : si elle se réveille, tout reprendra comme avant ? Et bien sûr que je suis un peu gênée de conjecturer que non.
Bien sûr que je suis désolée pour elle, et pour sa famille.
Mais la réalité, c'est qu'elle est là, couchée, les joues encore pleines, pas de masque de souffrance, et le bruit ronflant de l'air qui circule dans la canule au rythme de sa poitrine qui se soulève, et qu'elle n'a pas encore choisi de quel côté basculer.
C'est bien elle. Et elle respire.

Un lecteur de Cd diffuse le répertoire de la Chavannée.
Je lui parle un peu, pas longtemps,
et puis je prends sa main et je lui chante des chansons.
Sa main est froide, mais son front est chaud. L'infirmière dit qu'elle a un peu de fièvre.
Un peu plus tard je lui dis au revoir et à bientôt,
parce que oui, je retournerai la voir.

On est si fort, on tient bon.
Je pense à ma mère, du temps de son sourire et de son chignon banane.
Je pense à tous les survivants.
On est si faible.
On n'est qu'une petite flamme qui vacille au vent.
Un jour on chante, on rit, on danse.
On fait des projets,
on remet à demain.
Demain, oui, on lui dira qu'on l'aime.
Demain, on fera ce voyage.
Demain, on s'excusera.
Demain, on dira ce qu'on veut vraiment,
on se lèvera et on dira non.
Et voilà que le lendemain, justement, on n'est plus.
Ou alors juste un cœur qui bat,
prisonnier d'un corps empêché.
Et peut-être qu'on a des souvenirs,
peut-être qu'on a des regrets,
peut-être que c'est sombre,
peut-être qu'on voit la lumière.
On est comme une maison fermée aux fenêtres scellées.


8 commentaires:

  1. dans le désordre et trop vite:
    *je continue de penser à elle que je ne connais qu'à travers toi

    *magnifiques lumières de ces photos
    lieux de vie
    ou plus

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  2. je suis tellement émue, par les images et par tes textes, que je na sais pas quoi dire !

    Irène

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  3. ...que je NE sais pas...bien sûr, excuse moi

    Irène

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  4. Je souhaite que tes chansons traversent les murs qui la retiennent loin de vous et apaisent son silence...

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  5. @Coline le lien ne fonctionne pas "respire seule"

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  6. maintenant si !
    tu peux effacer mes commentaires bonne journée

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  7. Les paysages que tu nous donnes à voir sont... magnifiques !
    Le texte est très beau et je ne peux en dire plus.

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  8. @Geneviève : tu sais que c'est sur la voie de Vézelay ? Ça sert aussi de refuge jacquaire.

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