Aujourd'hui,
on a eu une intéressante conversation sur les chiens français.
" - Les chiens français comprennent tout : assis, couché, fais le beau !
Les chiens maliens ne comprennent rien.
- Bah, c'est parce que personne n'éduque les chiens maliens !
- Franchement madame, un chien c'est un chien...
- Eh bien je dirais que peut-être, quand tu vis au Mali, ta priorité ce n'est pas de nourrir et encore moins d'éduquer le chien, c'est de te nourrir toi. Mais ici, parfois, on est si seul, qu'on est bien heureux d'avoir un chien. Un chien est un très bon compagnon.
- Alors ici, si on a de l'argent, on peut le laisser à son chien après notre mort ?"
Choc des cultures.
Ceux qui me connaissent savent que j'enseigne le français à ceux qui sont arrivés jusque là.
Aux Européens qui ont choisi la France,
ont traversé la frontière librement,
parce qu'ils aiment notre mode de vie,
nos paysages, notre culture.
A ceux qui viennent pour marcher en sécurité dans la rue,
pour un peu de nourriture dans l'assiette,
pour nourrir leur famille,
pour ne plus avoir peur,
ni faim.
Pour l'école.
Je t'ai déjà dit ce que c'est l'école française vu de l'Afrique ?
Aux enfants de demandeurs d'asile,
ceux qui fuient leur pays juste pour pouvoir marcher en sécurité dans la rue.
Aux bébés tigres du sud de l'Asie, aux Bangladais, aux Pakistanais, aux Penjabis,
que leurs parents ont mis dans l'avion,
et qui avaient assez d'argent pour ne pas servir d'esclaves à leurs compatriotes,
Ceux là sont allés à l'école chez eux, et oui,
clairement, leur famille les envoie profiter du système...
Et fonde tous ses espoirs sur un tout jeune fils aîné.
14 ans quoi...
Tout seul ici, une langue, une culture, des codes que tu ne comprends pas.
Tu dois enlever ton turban, couper tes cheveux.
C'est un peu comme enlever ta culotte en public,
mais c'est ce que ton père te demande,
alors tu le fais...
A ceux qui ont traversé l'Afrique en camion,
embarqué dans une coquille de noix bondée,
ne se sont pas noyés au large de l'Italie,
ont passé la montagne en petites chaussures de toile.
Échoués dans un squat de compatriotes,
ils sont cornaqués jusqu'aux services sociaux.
Se déclarent mineurs isolés.
Depuis une circulaire Taubira,
une péréquation entre les départements les fait arriver jusque dans la Creuse.
Faut apprendre à gérer.
Je vous ai déjà raconté,
je crois,
comme ils sont heureux d'avoir un cahier et des stylos.
Mais est-ce que je vous ai déjà dit à quel point je les admire ?
Pour leur gnaque, leur respect, leur soif d'apprendre,
et cette capacité incroyable à intégrer à la vitesse de l'éclair
le principe de réalité.
Non, tu ne peux pas faire les études que tu souhaiterais.
Oui, la priorité c'est que tu sois en formation qualifiante avant tes 18 ans*,
Mais tu sais, un an ou deux ans, dans la vie c'est rien.
Tu pourras changer de métier plus tard, quand tu auras des papiers et un salaire.
Je l'ai bien fait moi !
Ils s'adaptent.
Quand ils ne sont pas allés à l'école avant,
je reste un peu plus le soir,
pour leur apprendre à écrire.
C'est mon temps, c'est mon choix.
Une toute petite chose gratuite, qui compte beaucoup pour moi, pour eux.
J'ai pas besoin de le leur rappeler :
les autres quittent la salle,
ils s'installent au fond, près du matériel.
On roule la pâte à modeler pour représenter la lettre en volume,
et il y en a un qui me dit : " Ah, en France, vous avez des moyens, c'est incroyable !"
De la pâte à modeler ! (je lui ai pas encore sorti la tablette).
Et dans ce colombin bleu, toute la pédagogie française vue de l'Afrique...
Alors à tous ceux qui disent
que la France ne peut pas absorber toute la misère du monde,
je voudrais dire
taisez votre indécence d'occidental bien nourri.
Posez un couvercle sur vos poubelles scandaleusement pleines,
et une brique dans vos toilettes alimentées en eau potable.
Je voudrais exprimer ma colère devant cette misère que nous alimentons,
et mon indignation à tous ces discours décomplexés que justifierait la crise.
La crise de quoi ?
Je voudrais faire remarquer que,
l'immigration clandestine en Europe,
c'est même pas 300 000 personnes par an,
qui, en outre, ne viennent pas toutes en France.
Autant dire rien,
En tout cas beaucoup moins que 700 qui meurent noyés.
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* Âge auquel le couperet tombe : c'est nul, on a payé pour eux, et ensuite on les abandonne. Du vrai gaspillage...
j'ai également une grande admiration
RépondreSupprimeret pour les derniers paragraphes je leur répliquerais aussi que(comme dans la chanson de JJGoldman) tu ne choisis pas l'endroit où tu nais
ps l'eau potable des WC j'ai toujours trouvé ça aberrant que ce soit (encore) le cas j'en parlais av hier encore
et bravo aussi pour tout ce que tu fais, leur apportes
RépondreSupprimerton investissement
(oui je sais ils l'apportent aussi mais quand même )
merci Coline ; tu exprimes si bien ce que nous ressentons . Le mal est profond ; le monde va mal . A chacun de nous de se mettre au boulot , comme on le peut et surtout d'oser nous indigner ouvertement et fermement qd lors de discussions on entend trop de bêtises et je suis polie ......... toi , en plus tu agis ; moi , un peu ....... Continuons et apprenons à nos enfants " la différence , le respect de l'autre , la tolérance "
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