lundi 25 mai 2015

Lucky frenchy


"Ça donne envie de faire le voyage, rien que pour prendre une belle leçon de vie. Tu as de la chance !"
Pascale


Pascale,
tu ne crois pas si bien dire.
Chaque fois que je regarde ceux de mes élèves qui sont arrivés comme ça 


Crédit photo Time
je mesure ma chance.

La chance d'être française déjà,
d'avoir un passeport.

La chance de pouvoir traverser l'Atlantique en avion,
avec un vrai visa,
de ne pas avoir à trembler en descendant de l'avion,
de ne pas avoir à chercher un service social,
de ne pas avoir besoin de raconter sans cesse mon histoire,
au risque de ne pas être crue,
de ne pas avoir à mentir non plus.

La chance de partir avec un contrat de travail,
la garantie d'être payée pendant trois ans si je le souhaite.
Un travail que j'aime,
pas un job alimentaire pour survivre,
après avoir fait une croix sur des rêves d'études.

La chance d'y trouver un toit au-dessus de ma tête,
propre et affordable,
une vieille voiture,
et pis p'têt même un vélo.

La chance de pouvoir profiter un peu sur place
découvrir d'autres cultures
au moins deux autres langues
vivre le carnaval
et le printemps louisianais
et tout ce dont je n'ai même pas encore idée.

La chance de laisser ici mes enfants dans un logement social,
salubre et suffisamment grand,
quasiment payé par l'APL,
avec ma pitite Polo,
et une bourse pour compléter leur mini job.

Pis, quand je voudrais,
la chance de pouvoir revenir dans mon pays que j'aime,
y retrouver un travail rémunéré,
un logement avec un jardin,
à un prix correct,
y être soignée si je suis malade,
et y vieillir en sécurité.

Ce qui fait que :
- la paperasse,
- l'affectation dans l'trou du bayou,
- la perspective de looooooooooooooooooongues heures de boulot pour m'adapter,
et de looooooooooooooongues semaines sans vacances,
- le système éducatif américain un peu particulier, mis en musique par des chefs d'établissement tout puissants
(parfois très compétents, parfois juste très....puissants),
- les cotisations maladie et retraite à payer moi-même sur un salaire pas mirobolant,
- la lourde chaleur humide,
- les moustiques,
- et les OGM...

c'est juste comme une petite contrepartie,
l'inévitable facture sans laquelle
la chance
ne serait qu'indécence.

5 commentaires:

  1. si vrai
    très bel article merci

    RépondreSupprimer
  2. Toujours aussi solaire. Ça fait un bien fou de te lire.

    RépondreSupprimer
  3. Tu me remets les idées en place... Toujours !

    RépondreSupprimer
  4. Ton post me parle beaucoup car je mets moi aussi souvent en rapport mes petits tracas avec les grandes tragédies que d'autres vivent.
    Ainsi, je relativise mes petits bobos et je me dis que j'ai énormément de chance d'être en bonne santé, d'avoir un toit, un boulot, une famille, des amis...

    RépondreSupprimer
  5. merci de m'avoir répondu de façon personnalisée , je me sens très honorée ! En tout cas, moi aussi, te lire me fait beaucoup de bien, et m'aide à me rappeler que j'ai aussi beaucoup de chance !
    Pascale

    RépondreSupprimer