mercredi 30 septembre 2020

Entre deux

J'écris bras et jambes nus, du balcon baigné de soleil, 



de mon hôtel entre deux.



entre deux sommets, 






Entre deux saisons, entre deux vies,
Entre deux hommes ? C'est drôle comme cette question est soudainement devenue secondaire.


Je suis descendue à la piscine thermale, le long du doron, 
soulagée d'être encore capable de faire cette distance.




Une parenthèse de trois semaines,
que je m'étais promis de m'offrir à ma première non rentrée.
Un peu décalée, mais tout aussi bienvenue.

vendredi 25 septembre 2020

La clé des champs

J'ai mis la clé dans la boîte aux lettres de l'école.
J'avais fermé la porte.
Et tout bien rangé.
Mini inventaire.
Lâcher-prise : ne rapporter que ce que je réutiliserai, les livres de littérature jeunesse, pour Vanouchka.
Le reste, même si ce fut à moi, dans une autre vie, je l'ai laissé.
Cette fois, c'est bien fini.


Le bal des vautours a commencé.
Bien que je revienne régulièrement, et que je sois supposée passer deux ou trois jours avec mon successeur, mes collègues se sont partagés ma dotation de masques en peau de slip.
Un seul m'aurait suffit...
Deux parents d'élèves, fraîchement élues à la mairie, dans un courriel très cavalier à la directrice,
intiment de vider les lieux avant dix jours, au profit du centre de loisirs.
Dernier coup de sang, dans un courriel de recadrage, la veille du jour des clés : l'année n'est pas terminée, le poste est toujours rattaché à l'école, un remplaçant va arriver. 

Que dire ? Que faire ?
Pas des reproches certainement.
La moindre manifestation de bienveillance, le plus petit geste de gentillesse, compte triple.
Dans cette époque étrange, qui agite les eaux intérieures les plus troubles de notre humanité, chacun s'arqueboute à des broutilles, oscillant entre anxiété paralysante et jugements agressifs.
Et continue, malgré tout, à faire son travail, à essayer de se projeter un peu, à tenir la classe à bout de bras.
Respect et admiration.
Ce qu'elles font, je n'aurais pas pu.
Moi j'ai mis les clés dans la boîte.

Petit détour par l'abbaye de Chantelle

Il faudra traverser le sombre hiver en se cramponnant.
L'horizon me semble plus clair depuis que j'ai rendu la clé.
Que le soleil brille ou que ça drache, il n'y aura plus de portail à franchir les mains gelées, les bras chargés, le cou trempé.


Un monde de chemins à explorer.




 

lundi 14 septembre 2020

La vie de camp (prononce le P s'il te plaît..)

La vie de camp, c'est d'abord un bon coup de balai.
La poussière a colonisé les recoins, les capricornes la table en bois, les souris le papier toilette, les feuilles sèches la salle d'eau rudimentaire.

La vie de camp, c'est se dire que tout passe.
Surtout ce qui n'est pas entretenu.
L'amour par exemple.

La vie de camp, c'est reconnecter les panneaux solaires et vivre en douze volts et au gaz.
Le téléphone va s'éteindre, exsangue de s'être acharné à trouver du réseau.
La vie de camp c'est la discrète présence familière des brunes limousines et de leurs veaux dans le clos voisin, le cliquetis des montants métalliques de la tonne où elles viennent s'abreuver.

La vie de camp, c'est la douche de plein air, à l'arrière de la cabane.
Quand on est venu à bout des joints qui fuient, s'ébattre dans l'eau tiédie de soleil, à la douce lumière déclinante du soir qui vient.

La vie de camp, c'est le ronronnement sifflant de la lampe à gaz, une délicieuse poêlée de courgettes et tomates offertes, garnie d'une tranche de jambon sec et de rondelles de chèvre.


C'est, dans la dernière chaleur, s'endormir sous le sac de couchage jeté négligemment.
S'emmitoufler précipitamment dedans, et chercher frénétiquement le zip, quand l'aube vient glacer les pieds et les épaules, dégoter une polaire en vitesse.
La vie de camp, c'est se rendormir un peu, pour s'apercevoir, au réveil, que le soleil est déjà haut.
C'est regarder l'or des feuilles ruisseler déjà de l'automne en marche, devant une bonne tasse de thé chaud.
Le bruissement des branches dans le vent léger du matin.
La vie de camp, c'est celle des gens qui ont le temps pour eux.
C'est mardi.
Je ne travaille pas.



 

lundi 7 septembre 2020

Un dimanche sans lundi

Un dimanche de retour, 
après bal et guinguette.
Une halte à St Flour, perchée sur un éperon rocheux,
souvent longée, jamais visitée.



Sans blues du dimanche soir, sans gamelle à préparer le cœur serré.
Ressortir à la nuit pour traîner un peu dans l'air subitement glacé des monts du Cantal.




Un dimanche sans tablette à gloutonner en jetant un dernier regard sur la semaine, et la longue liste de ce qui n'est pas tout à fait prêt.



Et un lundi, puisqu'il faut bien qu'il vienne !
Un lundi peuplé de couples de retraités en costume de randonnée, dans les murs séculaires de l'incroyable hôtel des Planchettes, un ancien séminaire encore propriété de l'évêché...













Avant un dernier tour en ville, et rentrer au camp de base...









 

dimanche 6 septembre 2020

Je te salue Marie

Je te salue Marie,
qui veille aux carrefours des chemins du sud-ouest.




Je te salue Marie, 
qui nous permet de respirer,
en donnant le courage à quelques uns, d'organiser des espaces de retrouvailles.


Je te salue Marie,
qui a tracé ma route belle et bonne pour remonter lentement.





Je te salue Marie,
qui a posé sur cette route une guinguette pleine de musique et de savonnettes...





 

vendredi 4 septembre 2020

Tous les matins du monde


Tendrement tiré des bras d'Eos, Hélios, escorté de deux montgolfières, s'élève au-dessus des brumes matinales du lac d'Ansbach.


C'est le premier matin du premier jour de mon espérance de vie.



Séléné s'est suspendue un moment à l'admirer.
Les hérons m'accueillent en sillonnant l'azur.
C'était une bonne idée de partir hier soir.


Les sens en éveil.
Les odeurs mêlées de l'herbe humide des pâturages, de la paille en rouleaux, le ploc des glands qui tombent, les trilles des passereaux, les cris des hérons, le bruit de la reprise du trafic sur l'autoroute qui surplombe mon petit bout de paradis, la fraîcheur de l'eau proche, et la douceur des premiers rayons du soleil sur mon visage et mes mains.
Tout m'invite à poursuivre ma route vers le Gers.




 

jeudi 3 septembre 2020

Ça flâne pour moi


J'ai attendu la lune.
La lune est là, encore presque pleine, et mon soleil intérieur la contemple avec ravissement. Elle s'est levée derrière le Puy de Dôme, pour venir éclairer les eaux du lac où je bivouaque.
Étrange liberté, finalement conquise trois jours après la rentrée.
Le remplaçant n'est pas venu.
La lune oui.
Et moi j'étais au rendez-vous.
Depuis l'aube de ce trois septembre, déjà sous son auspice, je savais que je n’attendrais pas le lendemain pour filer vers le sud-ouest.


Besoin de cruising, de route, de musique...
De solitude choisie pour savourer, réaliser, intégrer cette idée nouvelle et incroyable, que ma vie professionnelle sous contrainte s'arrête ici.



Et qu'une expérience nouvelle s'élance.
J'ai dit au revoir.
J'ai roulé jusqu'à l'heure où les chiens rentrent et les loups sortent.



 Je n'ai pas peur.

Devant ces pages blanches, j'espère, avec une intense curiosité.
Un tas d'envies, grandes et petites.
Très peu de vrais projets concrets.
Une profonde gratitude, et une immense confiance en l'univers qui se montre si bon pour moi.
Je respire.
Ma petite flamme intérieure se ranime.
C'est le temps des possibles.
Le temps de reprendre ma véritable identité.

Madame Nicole