En ce printemps breton, je remonte la pente.
En janvier, après un an vécu ici, je m'étais doucement et douloureusement alourdie. je me sentais comme une pauvre loque en mode mémère dans l'escalier. Entre la maison-boulet chronophage et les kilomètres en voiture, je n'écrivais plus.
Poids, douleur, tarissement : trois gros red flags. Et une sirène d'alarme : la succession de conflits quotidiens.
J'ai fini par dire : "Fais ce que tu veux, reste-ici si tu veux. Mais moi, le 1er septembre, je pars. Je n'en peux plus. Je trouve très injuste d'avoir à me sacrifier pour satisfaire tes besoins, alors que j'ai déjà tout quitté. Dans ta vie, rien n'a changé, sauf que tu as une femme de ménage et une cuisinière gratuites. Ce n'est pas équilibré.
Et puis tu m'as dit n'avoir jamais été heureux ici, que tu voulais partir. Alors pourquoi te cramponner ainsi ? Je ne te le redirai pas, mas décision est prise. Mais, en attendant mon départ, cultivons au moins de nouveau la joie d'être ensemble."
Si seulement c'était vrai....😅
Je sais que lui ne peut, ni décider, ni agir, en un claquement de doigts. Il lui faut un peu de temps. J'ai dû prendre le risque de lui faire confiance. Il est dans un état d'esprit : "j'ai envie de vivre ma retraite comme si j'étais en vacances" qui lui fait ouvrir les yeux sur le carcan de contingences qui l'étouffe, surtout depuis que je ne prends plus en charge ce qui ne me concerne pas ou n'est pas mon choix. Le nettoyage des sept velux, deux baies vitrées et quatre fenêtres par exemple. C'est un petit défi personnel, mais j'ai complètement lâché l'affaire de l'entretien de ce gouffre. Au fond, ce n'est pas mon problème. Je pense qu'il voit la différence.
A partir de là, chaque jour est redevenu joyeux, léger et serein.
6 commentaires:
bravo !
J'admire ta capacité à revenir toujours à ce qui est essentiel pour toi... j'ai quelques progrès à faire encore dans ce domaine !
Je te lis pour ça toujours avec beaucoup d'intérêt !
Anne d'Alsace
Il y a dans ton cheminement quelque chose qui ne cesse de m'étonner, de me questionner : tu places ta liberté comme un besoin fondamental. Et cela te permet de faire des choix qui te permettent d'avancer, et finalement de faire avancer ceux qui t'entourent.
J'essaie de cultiver cette force en moi, mais je constate qu'elle brule en toi comme qqchose de vital.
@Anne d'Alsace : Ah l'essentiel ! Notre essence. C'est tout de même difficile, en tant que femme, de se recentrer sur ce qui est bon pour nous, sans passer pour un monstre d'égoïsme. Mes enfants disent cependant que ce trait de mon caractère qui les encourage à faire leurs propres choix.
@Cyann : C'est très juste. Il suffit que, d'une manière ou d'une autre, je me sente entravée, pour avoir le réflexe de briser ce carcan, sous peine de défaillir. Mon corps m'envoie du reste des signaux impossibles à ignorer.
Mais le prix à payer pour cette liberté, c'est le risque de solitude.
C'est dans notre nature humaine d'appartenir à un clan, un groupe. Il en va de notre survie. Mais nous possédons aussi cette capacité de curiosité, d'expérimentation, et de décision non conforme aux règles, qui ont fait de nous un superprédateur.
Un pied sur chaque versant d'une même nature, il nous faut conserver l'équilibre. Je crois bien que, plus on vieillit, plus notre besoin de sécurité s'affronte à celui de liberté.
Le curseur n'est pas le même pour tous les individus.
Merci pour ta réponse, qui me trotte encore dans la tête, alors que plusieurs semaines se sont écoulées depuis. D'abord, parce que c'est trés bien écrit, cette image des 2 pieds sur un versant différent me parle beaucoup. Et puis, parce que je crois qu'en vieillissant, j'évolue. Mon besoin de liberté grandit, et dépasse peu à peu mes peurs. C'est qqfois effrayant, et qqfois euphorisant ... Grandir est une sacré aventure, vieillir en est une autre, non moins passionnante.
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