mardi 28 juillet 2020

Cela commence par un peu de chagrin l'Amérique #10 Cinq ans déjà

Il y a cinq ans, jour pour jour, c'était aussi un mardi,
je prenais le train vers Roissy.
J'avais quitté Embraud après la fête,
la tête pleine d'étoiles,
d'avoir fait une belle rencontre, qui ne m'aura pourtant accompagnée que quelques mois.
Le temps de réveiller mon cœur.



Il y a cinq ans, jour pour jour, c'était aussi un mardi,
je traînais les deux valises de toute ma vie, à l'aéroport,
avec beaucoup d'enthousiasme,
et aussi cette petite boule au fond de la gorge,
quand on saute à pieds joints dans le grand inconnu.


Il y a cinq ans, jour pour jour, c'était aussi un mardi,
j'atterrissais sur la terre de Louisiane.
Martine, vêtue de blanc, m'attendait à l'aéroport de Lafayette.
Elle m'a conduite chez elle, elle avait préparé une soupe de petits pois,
la plus délicieuse et la plus réconfortante des soupes de toute ma vie.


Il y a cinq ans, jour pour jour, c'était aussi un mardi,
la femme de Padna rendait l'âme,
en France, après des semaines de souffrance.
Je ne l'ai su que bien des mois après,
et ça me tourmente toujours un peu,
ce hasard incroyable,
cette impression d'avoir été utilisée contre ma volonté,
pour consoler un chagrin qui n'était pas le mien,
et qu'il me semble pleurer encore.

Toute cette semaine j'ai repensé à cela,
avec une tristesse infinie,
un sentiment de perte terrible.
Pourquoi moi ?
Je voudrais retrouver le calme.

mardi 21 juillet 2020

Oh temps, suspend ton vol ...



... et vous, heures propices !
Suspendez votre cours : laissez-nous savourer les rapides délices
Des plus beaux de nos jours !

Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire,
Que les parfums légers de ton air embaumé,
Que tout ce qu'on entend, l'on voit ou l'on respire,
Tout dise : Ils ont aimé !
Alphonse de Lamartine

Plus de trois semaines que je tiens bon,
pourtant rien ne s'efface.
Dans mon cœur, Padna tient encore toute la place.
Il reste silencieux aussi, c'est que ça doit lui convenir.
Cette absence de réaction, c'est encore plus douloureux. 
Une fois de plus, j'ai pris la décision qui ... l'arrange !
Je l'aurais attendu pourtant, sans aucune hésitation, s'il avait eu les mots pour me le demander.
S'il avait essayé de trouver un autre billet d'avion, ou juste un téléphone.
S'il m'avait dit qu'il s'ennuyait de moi.
Si je m'étais sentie aimée.

Pourtant c'est drôle, à côté de ça, la tristesse a reculé,
la joie de vivre a repris le dessus.
Il y a quelque chose de vaste et de puissant dans cet univers,
qui oblige à avancer ,
et qui place, sur le bord du chemin, tout ce dont j'ai besoin,
hormis l'amour, qui est peut-être un peu plus loin ?


Et puis, il y a que, e temps a pris une autre dimension. Il semble s'être ralenti.
Il y a toujours les mauvaises nouvelles, et même les funérailles, 
qui me rappellent que l'horloge tourne.
Pourtant à ce moment de juillet, qui voit chaque année,
le compte à rebours s'enclencher vers la rentrée, je me suis dit hier,
"Tiens ? On n'est que le 20 ?"
Et je me suis sentie réconfortée.
Ce ne sont pas juste des vacances. 
Ce sont les premières lignes du  nouveau tome de ma saga personnelle...


premier petit-déjeuner au jardin...

Hier fut important.
Premier entretien (enfin !) pour cette rupture conventionnelle.
Annoncé un peu au dernier moment, pas facile de trouver un délégué pour m'accompagner.
Un autre rendez-vous à décaler aussi, et j'ai dû rentrer de Creuse en vitesse, 
en naviguant sur ces petites routes estivales entrecoupées d'un tas de travaux et de déviations...
Pourtant aucun stress, et il me semble avoir bien géré.
Départ prévu pour le 1er octobre, indemnité en négociation, prochaine entrevue le 24 août.
Cela ne change rien à ma décision.
Je veux bien accorder quelques jours de passage de témoin à la rentrée, mais je ne ferai pas plus.
Inconcevable, après tout ce retard, de me remettre encore en tension.

Mon corps, mon cerveau, mon âme, enfin alignés,
ont pris goût à la liberté, aux journées qui s'étirent un peu,
à la vie sans contrainte.

Enfin, presque sans contrainte, si l'on considère la situation sanitaire.
Certes, nous dansons avec plaisir, les petits bals éclosent, les masques tombent,
dans notre région où le virus ne circule quasiment pas.




Au quotidien, en pleine campagne, rien ne change non plus.
Pourtant, dans la semaine qui suit, je me surveille, plus ou moins consciemment, je guette des signes. C'est terrible.
Et dès que je rentre quelque part, je mets le masque.
Je ne me pose pas trop de questions.
Je ne suis ni pour, ni contre, je le fais, c'est pas une grosse affaire.
Tous ces grands débats me fatiguent.

mardi 14 juillet 2020

Week-end plus size # 14 Retrouver l'espoir au petit bal perdu...

La tristesse est-elle soluble dans la danse ?
ça me semble que oui....
Un grand merci à Michel (et à tous ceux qui l'ont aidé)
 pour avoir réalisé son rêve,
en nous offrant un bien joli cadeau pour son soixantième anniversaire.

Bien sûr, on avait déjà un peu redansé, prudemment, de loin, entre Chavans.
Mais quand j'ai vu l'invitation à ce premier "Festibal du monde d'après",
je ne me suis pas posée de question, je me suis incrite.
(c'était obligatoire : non seulement il y avait une jauge limitant le nombre d'entrées,
mais il fallait les coordonnées de chacun, en cas que...)

On est rentré de Royan, j'ai demandé deux jours d'hospitalité supplémentaire à ma belle-fille et à mon fils, qui se sont montré ravis de me voir reprendre couleurs et joie de vivre.


Tout était parfaitement organisé, les toilettes sèches en nombre suffisant
 les parkings avec ou sans dodo
 le désinfectant, les cuves d'eau et les blocs de savon.
Et surtout un système de ruban, afin que la sensibilité de chacun soit respectée.


Le cadre était idyllique.
Michel est agriculteur, c'est donc sur ses terres,
en bord de rivière, que nous avons réinventé le monde dans lequel il faudra vivre avec...




J'ai dansé, dansé...(et je me suis beaucoup lavé les mains).
Tout le monde avait l'air de sortir d'un cauchemar éveillé.
Alors oui, seules quelques personnes vulnérables à ruban rouge, portaient un masque.
Oui sur le nombre, forcément, il y avait des porteurs (bien que le virus circule très peu en Limousin).
Mais c'est assez clair dans mon esprit :
si l'on m'en enterre, que ce soit morte.
Pas vivante.


C'était bon de retrouver du monde pas vu depuis longtemps.
De se caler dans des bras pour danser.
J'ai repris espoir.




Je sais qu'il y aura d'autres bals, d'autres retrouvailles, d'autres rencontres.
Evidemment, quand on repart, c'est avec prudence qu'on reste à distance des gens fragiles,
qu'on remet son masque pour faire ses courses.
Bien plus que la crainte d'être malade, j'appréhende de contaminer quelqu'un qui n'aurait pas pas choisi le même risque que moi.


Voilà, c'était une fin de semaine pleine d'émotions,
que j'ai laissé filer dans l'eau d'un étang sur le chemin du retour.
Quand le corps et le cœur ont besoin de récupérer,
et que le chemin t'offre un plan d'eau.
Le plaisir de se baigner nue, dans les eaux calmes et douces de mon nid bourbonnais retrouvé,
c'est aussi une chance magnifique de ma vie actuelle.


PS. Je confirme que les cheveux de la liberté, c'était le bon choix pour danser et nager en toute légèreté. Deux grandes semaines que je tiens bon...

vendredi 10 juillet 2020

Last beginning summer day

C'est donc le dernier jour de ce début de vacances d'été.
Il a plu cette nuit, il faisait gris ce matin, comme pour nous épargner des regrets.
Les enfants sont partis.
Je m'attarde sur la plage de Pontaillac, un dernier bain, un pique-nique, je ne suis pas pressée de mettre les voiles.


Je m'autorise à m'extraire du moment présent, pour laisser divaguer mes pensées.
Rêvasserie ou réflexion ?
Peu importe.

Juillet 2015, je bouclais mes deux valises pour la Louisiane.
Au dernier bal, la fête d'été d'Embraud, une jolie rencontre, éphémère, juste assez importante pour me donner confiance.
Quelques points de suspension.
Le point final aux vacances d'hiver.
Un frère de souffrance, une âme tourmentée, un musicien hors normes, qui se sentait traqué par la mort, tout en empruntant les sentiers de vie les plus dangereux.
J'ai appris hier qu'il est gravement malade.
On peut dire que ça m'a bien remis quelques idées en place.
Le temps que le voile nuageux se déchire au-dessus de la plage déserte, tout un film s'est rejoué.


Pas de fête cet été.
Mais quelques bals par ci par là, des ateliers d'écriture, des amis à visiter, un jardin à créer, des permanences à assurer, et du temps à laisser doucement couler.
Mon bujo se remplit doucement, au fur et à mesure que je gomme d'anciens rendez-vous qui n'auront pas lieu.
Des festivals reportés.
Le retour de Padna évité.
Des bals annulés.
Je n'imaginais rien de cela quand je suis rerentrée  en chemin en février...
Comme si la vie me promettait d'incroyables surprises !


mercredi 8 juillet 2020

La vie qui va

C'est certainement l'une des meilleures décisions que j'aie prises cette année.
Je vois mon petit-fils prendre des couleurs et grandir de jour en jour.
Il court vers l'eau, se roule dedans, crachouille un peu parfois, plisse son nez de joie, en découvrant les perles de ses petites dents, passe de longs moments à bricoler dans le sable, découvrant les formes malléables, l'écoulement, la pêche aux mini crabes avec son père.



Impossible de ne pas garder le sourire dans ces conditions.

Quant aux autres décisions, leurs effets sont joliment différés.

Ma rupture conventionnelle n'aura probablement lieu qu'en octobre voire novembre. Je n'en suis qu'un peu agacée mais je n'ai aucun contrôle là-dessus. 
Alors bon, ce sera en cours d'année scolaire et pour mon soixantième anniversaire ! 

Quant à ma rupture affective, j'en souffre.
Mes pensées se balancent inutilement d'un bord à l'autre, guettant un peu tout et n'importe quel signe d'éclaircie.
Mais, pour être honnête, ça va bien mieux les pieds dans l'eau !


Édit : ah j'oubliais une autre excellente décision capitale, me couper les cheveux.
Je m'en félicite chaque fois que je plonge dans une vague, et c'est souvent....

vendredi 3 juillet 2020

La première fois

Les premières fois ont le goût de l'exceptionnel.
Celle-ci fût joyeuse et un peu énervée après le voyage.
D'abord il ne voulait ni se salir en marchant dans le sable, ni se mouiller les pieds dans les vaguelettes.
Depuis la hune des bras maternels, il a observé les autres jeunes enfants qui s'égaillaient sur la plage.
Et puis il s'est lancé, et là, Franzouski a dû rester au taquet.
Moi, en filmant cette première fois, je riais aux éclats, fière de mon idée, de ce cadeau.
Pour une fois Maïouchka avait oublié les habits de rechange.
On l'a emmailloté dans mon cache-coeur bleu et doux.


B



A l'heure où je vous écris...

A l'heure où je vous écris,
j'entends le tac-tac-tac-tac des pas de mon petit-fils dans le couloir envahi d'un tas de sacs.
Je suis arrivée hier soir tard, et nous partons ce matin pour l'océan.

A l'heure où je vous écris, je voudrais avoir l'esprit libre,
mais ma situation n'est pas réglée, bien que le rectorat m'ait redonné un peu d'espoir.
Dans ma tête l'échéance est repoussée à la fin de l'été.
Et j'ai posé dans mon jardin ce joli cadeau de l'équipe de mon école de rattachement,  trouvé hier en arrivant dans mon bureau.
J'ai un peu pleuré, et puis je me suis mise au travail.
Car, à l'heure où je vous écris, j'ai rédigé des synthèses jusqu'à 2 heures du matin, et il m'en reste une avant de partir. La situation depuis le confinement s'est encore aggravée.
Je suis déjà un peu en route, mais la sortie officielle c'est ce soir, et je veux que tout soit clair.
Evidemment, il me faudra revenir pendant l'été, ranger et inventorier le local, puis faire un bilan de l'année... Mais ce sera la dernière fois !



A l'heure où je vous écris, je repense à Embraud, 
où la préparation de la fête de l'été devrait battre son plein.
Tout était si bêtement vide et silencieux, mercredi, quand je suis repassée au jardin pour la dernière fois.


A l'heure où je vous écris,
je me sens bien moins triste
En conduisant hier soir, je voyais la lune gibbeuse me regarder,
dans un ciel d'azur sombre,
vaste et lumineux,
bien qu'un peu tourmenté de nuages épais.
J'ai eu la conviction profonde que tout ira bien,
éprouvé un sentiment de liberté incroyable devant cet été sans rentrée qui commence, ressenti une confiance profonde dans l'idée que tout est possible,
même dans les temps difficiles.
Mais je pense encore trop souvent à Padna, qui me manque cruellement.
Une semaine que je tiens bon, depuis qu'il ma annoncé l'annulation de son voyage en France.
Une semaine sans écrire, sans entendre sa voix, c'est pas bien long.
Il me faut rester cramponné au bastingage, attendre sans lutter contre les éléments, que le navire ait fini de virer de bord, vers une autre latitude, et que le chagrin,
comme tout, s'efface.