mercredi 17 mars 2021

La grossitude ça n'existe pas #19 Réincarnée

Il y a un an, j'évoquais ici le corps obèse, qui crie justice après un traumatisme.
Je concluais par cette question :
"Faut-il remuer le passé ?
Vaut-il mieux laisser retomber la boue et nager dans les eaux claires de surface, ou nettoyer à grand peine cette vase qui trouble la fontaine ?"
Elle est toujours sans réponse, ensevelie sous l'omerta familiale.
Sur la tête de mon oncle pédophile, ne se sont abattues ni la justice des hommes, ni celle de Dieu.
Et dans la mienne, il reste cette petite valise, soigneusement cadenassée, et encore bien lourde.
Malgré l'impunité, malgré le silence, je veux la laisser sur le bord du chemin.
Je veux me réincarner.

J'aurais pu faire le choix d'une mutilante chirurgie bariatrique, continuer à tenir mon corps à l'écart de mon cerveau.
J'ai opté, il y a longtemps déjà, pour l'acceptation.
L'acceptation de mon corps tel qu'il est.
Qui a porté et nourri deux enfants.
Qui m'a conduit où je voulais, sans me faire payer le prix fort.
Qui me permet d'éprouver envie, désir et plaisir.
Le désir de vivre, le plaisir de manger, la douceur de m'aimer.
L'envie de retrouver une condition physique à la hauteur de mes pérégrinations aventureuses.

En ces temps confinesques, bouger seule exige une volonté de fer, que je n'ai pas toujours,
sauf pour les étirements matinaux quotidiens.
Heureusement, nous vivons dans ce merveilleux pays qu'est la France, où, moyennant une (trop peu connue) prescription d'activités physiques adaptées, toute personne présentant une ALD, ou un facteur de risques (obésité, diabète, hypertension...), ou âgée de plus de 70 ans, peut pratiquer une activité sur ordonnance, dans un cadre sécurisé.
Même (et surtout...) pendant la crise sanitaire.
J'ai appelé un organisme qui s'appelle le DAPAP en Auvergne Rhône-Alpes, mais qui existe certainement ailleurs. 
Un rendez-vous m'a été proposé pour l'entretien de motivation et les tests de condition physique.
Puis j'ai été orientée vers des ateliers "Passerelle", deux fois par semaine, pas très loin de chez moi.
Cela aurait pu être du sport santé, du sport bien être, une association locale, mais, il faut bien le dire, l'heure n'est pas aux offres pléthoriques. 
Entre temps, la piscine a aussi rouvert ses portes aux publics dits prioritaires.
Je vais donc à la gym deux fois par semaine, à la piscine une fois.
Les autres jours, je cours les bois, à pied comme à vélo.
Le corps, c'était pour moi l'antidote de l'esprit.
C'est désormais un allié qui se bat à mes côtés, pour vivre bien, pour vivre heureuse.

A 60 ans, j'ai récupéré une condition physique que je croyais perdue, avec une régression notable des douleurs et aucune prises de médicaments évidemment.
Cherry sur le cupcake, la balance dépoussiérée déplace doucement son aiguille vers la gauche.

Mais surtout, je me suis retrouvée.
Pour la première fois depuis mes cinq ans, mon corps et mon cerveau ne semblent plus dissociés.
Manger est redevenu un plaisir subtil et varié,
que j'apprécie d'autant plus qu'il est partagé avec un homme dont le sourire ne saurait me laisser indifférente.
Il y a dans cette reconnexion, une sorte de justice retrouvée.
Une réappropriation de mon corps, comme si mon âme captive m'avait été, enfin, rendue.
Dans un coin d'ombre, une blessure reste douloureuse, prête à se rouvrir.
Mais dans deux lunes, la femme sauvage aura gagné.
Et je pourrais vivre l'histoire douce et tendre qui m'attend et que je mérite.

Sinon, j'ai vu ce film,
et je l'ai adoré.







9 commentaires:

Barbara a dit…

ça commence avec tristesses et souffrances
mais la suite de tes lignes renouvelle espoir, espérance, futur ,avenir , promesses
et ça c'est chouette!
ps j'ai du mal à écrire ,décrire, trouver les mots ce matin
mais déjà suis heureuse (et plus que ça) pour toi !

♥ à suivre avec du positif et de belles nouvelles
je t'embrasse fort

ps pour le dispositif , perso si je connais
mais non pas partout
quand loin de tout que pas les infrastructures ... y a pas

Anonyme a dit…

Bonjour, j'ai écouté cette émission hier et elle résonne ce matin avec votre billet.
https://www.franceculture.fr/emissions/esprit-de-justice/comment-reparer-lirreparable

Courage à vous, accrochez vous à votre chemin qui vous accorde le meilleur.

Madame Nicole a dit…

@no name : oui j'ai écouté cette émission.
Finalement je ne cherche guère réparation. Plutôt la guérison. Ne pas être infiniment punie d'un crime que je n'ai pas commis.

Madame Nicole a dit…

@Barbara : oui il y a des régions mieux dotées que d'autres, même si, en PACA, c'est assez développé, avec un dispositif de remboursement et des maisons de sport santé.
Les collectivités ne sont malheureusement pas impliquées partout et c'est bien dommage.

Barbara a dit…
Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.
Barbara a dit…

@Nicole non contrairement à ce que beaucoup croient PACA n'est pas bien dôtéenon car Paca c'est vaste Marseille et Nice ne sont pas tout
y a aussi les villages du centre et haut Var idem ds Vaucluse ou les Hautes Alpes ya énomément de déserts medicaux d'endroits non dotés
de rdvs dans 6 mois voire plus(un an)
l'an dernier j'ai eu les chiffres exacts ds une étude de l'assurance maladie d'ailleurs
j'ai encore passé 2h hier (réellement ) pour un rdv
4e tentative depuis novembre pour quand eu enfin standard m'entendre dire plus de places (que 10...) rappelez en septembre (ou le standard sera pris d'assaut pareillement)
et je parle même pas d'un rdv hypothétique que j'attends depuis 4 ans (donc en attendant pas de traitement)en plus là hôpital occupé par covid donc ....
non je peux pas détailler + et puis c'est pas intéressant ni le lieu mais je te l'assure

Madame Nicole a dit…

Ah mais je te crois.
Toutes les régions ont des pôles d'attraction bien desservis et 100km plus loin c'est la toundra...
À ce point cependant je suis sidérée. Pire que chez nous....

Barbara a dit…

eh oui
....
bisous

Barbara a dit…

bisous