mercredi 6 mai 2009

Le fruit de mes entrailles



Aujourd'hui, mon Paul a eu douze ans.
Déjà !
C'était le deuxième des plus beaux jours de ma vie et c'était un mardi.
Je l'ai senti cogner pour sortir. Quelques heures après, il était là, tout chaud et glissant sur mon ventre.
Il avait certainement eu une peur bleue, parce qu'après il en a fait une jaunisse.
Je le comprends.
Je le revois, tout nu dans la couveuse, sous les lampes à UV. Moi, avec mes lunettes de soleil pour le regarder, et lui avec ce truc sur les yeux qui lui donnait l'air d'une mouche. Je le sortais pour l'allaiter, je ne voulais pas que nous soyions séparés.
En plus, quand il est venu au monde, son père a dit : "Qu'est-ce qu'il est moche !"
Franchement ? C'était vrai ...
Sa petite figure était partie en biais, vers la gauche. Il avait l'air d'un boxeur. C'est qu'il avait bien poussé en tournant la tête, comme c'est dit dans les livres, exactement.
Il a dû se ruiner les cervicales au passage parce qu'il a passé les six mois suivants à brailler dès qu'il était couché.
On n'était pas branché osthéo à l'époque. J'ai l'impression que je l'avais au sein tout le temps, juste pour le faire taire.

C'est justement ça qui m'a sauvé la vie quand nous avons eu ce grave accident en revenant de Hamburg.

Il avait neuf mois.
Braiments, hurlements, maman passe au fond.
Des Polonais, arrêtés, tous feux éteints, la nuit, sur l'autoroute, en pleine voie.
La vitesse n'est pas limitée Outre-Rhin ; un coup de volant, le tête-à-queue, explosés en travers par une Mercedes.
Elle rien.
Nous en VW heureusement ...
Mais quand même, plus de place passager : écrabouillée.
Une vie donnée en neuf mois.
Neuf mois plus tard, une vie rendue.
Cadeau.

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