ça m'a rappelé une
chanson écrite il y a déjà quatre ans
et je me suis demandée ce qui, désormais,
me manque le plus dans l'amour d'un homme
quand il n'y en a pas dans ma vie.
Le sexe ?
Non, pas vraiment.
Les vagues de plaisir qui nous emportent, on peut aussi bien les faire affluer seule,
ou dans les bras d'un soir,
et ma fois,
j'ai passé l'âge de me jeter sur le premier venu pour calmer ma faim.
Dix ans j'ai eu une vie sexuelle créative, dix ans j'y ai cru, dix ans je n'ai pas été heureuse.
Partager le quotidien ? S'appuyer sur quelqu'un de gentil ? Voir la lumière allumée et la table mise quand on rentre ?
Non, pas vraiment.
Un compagnon, c'est pas une aide à domicile.
Pour ça, il y a les chèques emploi-service.
Dix ans j'étais devant mon écran et il sortait la poubelle, dix ans je n'ai pas touché une perceuse, dix ans j'y ai cru, dix ans je n'ai pas été heureuse.
J'étais sûre que ce qui me manquait le plus,
c'est quand je suis debout dans la cuisine, la chaleur contre mon dos
et les mains qui s'insinuent
et viennent tracer un cercle tendre à l'aplomb des lèvres dans mon cou.
C'est glisser ma main dans la sienne pour descendre la rue jusqu'au cinéma, et m'appuyer un peu contre lui quand on attend pour entrer, et quand le noir se fait devant l'écran, poser ma tête sur son épaule, sentir sa main sur ma cuisse et perdre parfois un peu le fil parce que les lèvres se cherchent dans l'obscurité.
C'est s'allonger dans l'herbe après le pique-nique, sur la même couverture, à regarder défiler les nuages, compter les chevaux sauvages, et presque s'endormir si ses doigts ne s'étaient pas égarés, oublier l'attelage de chimères et finalement s'endormir quand même.
C'est m'asseoir en tailleur entre ses cuisses et rester sur la plage pour regarder le soleil plonger dans l'eau, frémir un peu du frais de la nuit, rester encore pour soi-disant compter les étoiles, et basculer sur le sable, mais cette fois sous la couverture.
C'est rentrer les joues froides, et préparer du thé, parler un peu, se taire longtemps, et boire le thé l'un contre l'autre.
C'est s'embrasser pour se dire bonjour, bonne nuit, à ce soir, tiens tu es rentré ?
Oui, j'étais sûre que c'était ce qui me manquait.
Des choses simples.
Pourtant, quand je les ai eues
pas toutes, mais beaucoup,
les bras autour de moi, le souffle sur ma nuque,
et s'endormir dans la chaleur des peaux qui se reconnaissent, et se réveiller un peu mélangés,
j'y ai cru,
je voulais y croire,
et mon cœur sonnait faux.
Je n'avais pas envie de l'entendre, ça me faisait mal,
je me disais, tu vas rester seule avec toutes tes exigences.
Jusqu'à ce que le désir s'en aille, jusqu'à ce que je n'ai plus envie de partager mon lit.
Jusqu'à ce que ce soit une évidence.
Non, ça ne suffit pas.
J'ai pleuré de ça.
J'étais en colère contre moi-même,
mais non vraiment, je ne pouvais pas.
Il faut quand même que ce soit la bonne personne.
Celle avec qui on est en sécurité,
celle avec qui on partage
sans que l'un ou l'autre doive changer,
celle qui nous emmène plus loin, plus haut,
qui nous précède et qui nous suive,
celle avec qui c'est tout calme à l'intérieur
alors que jamais on ne s'ennuie.
Celle à qui on peut parler franchement
à qui pourtant on n'est pas obligé de tout dire.
Voilà plusieurs fois que je l'écris,
mais maintenant, c'est une conviction
qui fait intimement partie de moi.
Quand on n'a plus l'alibi des enfants, de la maison,
et que le temps court désormais trop vite pour le perdre à faire semblant,
la main qui glisse sous le t-shirt est une épreuve de vérité,
voilà à quoi ce dessin m'a fait penser.