Mon camp de base est désormais la Bretagne des bois.
Dans le Bourbonnais je m'étais réparée.
Ici je veux m'épanouir.
Ce n'est pas toujours facile.
Allées et venues du quotidien de Madame Nicole en pays Pourlet.
Je pense qu'on peut dire qu'on a eu de la chance.
A dix minutes de route,
les maisons se sont retournées avec des gens dessous, toits arrachés,
châteaux d'eau effondrés (mais ils sont pas comme chez nous, ils sont montés sur de grandes pattes ...)
Demain non plus pas d'école,
pour cause d'eau qu'il faut bouillir avant de la consommer.
(Photo facebook)
Icite,
juste quitte pour un tit brin beaucoup un tas d'eau,
Mais c'est pas grave
j'ai les bottes locales...
Finalement, j'ai passé une bonne journée de méditation sur les hasards de la vie,et à communiquer avec l'autre bord sans me préoccuper du décalage horaire (n'est-ce pas Gren ...)
En compagnie de ma lampe de poche et de mon poste radio pour les alertes,
j'ai aussi fait une deuxième jam session de kumquats,
C'est la première fois que l'école (et beaucoup d'autres) est fermée,
parce qu'on attend un épisode climatique sévère,
autrement dit une tornade.
Il fait déjà un peu froid, c'est le premier signe.
Le crash est prévu pour cet après-midi.
Si ça craint, je me réfugierais dans la maison de briques de mes voisins propriétaires.
Pis ce matin,
comme tous les matins,
un couple de cardinaux
sont venus faire un tour sur mon arbre.
Les cadjins disent que quand tu vois un cardinal dans ton jardin,
c'est que quelqu'un est en train de penser à toi.
Je trouve ça bien plaisant de me souvenir de cette histoire chaque jour.
Bon là on ne voit pas qu'il est rouge vif...
mais il l'est !
Edit : apparemment il y a une interprétation différente selon les bayous, ça peut être aussi que quelqu'un qui est mort vient te visiter... Et j'aime bien l'idée aussi.
Vous vous souvenez probablement du jour où j'ai reçu mon affectation dans le bayou,
et de l'attaque de panique que j'avais dû affronter ?
Ma vie ce jour là a pris un autre chemin.
Celui des soirées comme celle d'hier, petite virée en voiture avec des femmes de mon âge, une génération qui parle français donc (et dont je comprends bien l'anglais grâce à leur accent).
Et énormes crises de fou rire, quand elles racontent toutes les anecdotes de la génération qui ne comprenait pas un mot d'anglais, ou même tout simplement des malentendus avec les américains non francophones.
C'est difficile de vous faire partager ça hors contexte, mais mes préférées ce sont :
- la vieille dame - qui a deux fils anglophones qui jurent tout le temps - et qui invite sa sœur pour un café, et lui dit "Passe moi le fucking sucre s'il te plaît".
"Mais enfin, tu ne peux pas dire ça, c'est vraiment vilain !... répond la soeur assez choquée.
"Ah bon ? Mais Chance y dit ça tout le temps !"
- ou la dame qui s'appelle Anit Mabile (on entend le t du prénom) et qui va chez le médecin. La réceptionniste lui demande son nom
"- What's your name ?
- Anit Mabile
- Sure madame, you will receive your bill, but before, you have to see the doctor.
So, what's your name ?
- Anit Mabile (I need my bill - j'ai besoin de la facture - pour un locuteur non initié)."
J'en pleure encore de rire...
On est donc parties se relaxer devant un show de country en mangeant du tak tak,
c'est-à-dire du pop corn, que les cadjins appellent comme ça,
parce que quand tu fais sauter le maïs, ben il fait tak tak...
Quand je regarde les fils facebook,
je vois tout ce que publient mes collègues sur ce qu'ils font.
Et ceux de la ville font beaucoup de sorties et de voyages ensemble,
ce qui est bien naturel.
Certains ont la chance de rencontrer des américains et de partager avec eux,
par le biais du sport ou des tables françaises,
d'autres pas du tout.
Mais pour moi,
le choix est simple : soit vivre isolée dans l'attente d'une prochaine rencontre avec d'autres expatriés,
soit m'intégrer ici,
et je n'ai pas besoin de vous expliquer quelle option j'ai choisie,
surtout depuis que j'ai déménagé.
J'ai aussi eu la chance de rencontrer Daniel,
pour la langue et la danse,
et Martine pour l'amitié,
ainsi que mes collègues belges de Pierre Part,
et tout un tas d'autre monde bien plaisant.
C'est maintenant que je profite réellement,
tout en retrouvant avec plaisir mes collègues quand ils m'invitent ou viennent me voir.
On est proche de la fin de l'année scolaire
et je sens que l'aventure prend un tour différent
qui me redonne un second souffle.
Il y a des jours comme ça,
pleins de surprises,
et où la balance penche du côté qui te fait remiser dans les vieilleries de la semaine,
les propos déplacés d'une collègue ou les inévitables embrouilles parentales.
Il y a des jours où je reçois un de vos courriels,
et hier c'était celui de Mamina,
vous vous souvenez, qui était venue m'attendre sur une étape du chemin ?
Je vous le redis : les signes que vous me faites font comme des balises quand la piste me semble trop loin... Edit : ici la rencontre avec Mamina (un autre lien)
Après l'école,
j'ai filé à Morgan city, récupérer ma petite chaîne en or,
celle avec deux dauphins et une coquille, qui était en réparation.
Et en rentrant, je suis passée devant chez Landry,
le restaurant de fruits de mer de Pierre Part,
et j'ai éprouvé la brutale envie de manger mon premier bouillir d'écrevisses.
Comme c'était vendredi et que l'établissement était plein,
il y avait une liste d'attente,
mais j'ai trouvé asile à la table d'une dame de l'école,
qui était là avec son mari.
cadjins et francophones tous les deux,
et ça j'adore, surtout depuis que je connais Dan,
grâce auquel mon glossaire du parler local s'est bien étendu.
Un chouette souper donc,
avec tutoriel intégré pour le décorticage des bestioles,
que je m'abstiens de vous retransmettre, parce que c'est hyper sexe quand tu écris ça au lieu de le montrer...
Je ferai une vidéo la prochaine fois...
En tout cas, c'est vraiment très bon.
Et c'est au poids.
Là il y a deux livres, soit 900 g environ, mais une fois que t'as enlevé les carapaces... ben tu peux en recommander.
Et à la fin, mes camarades de table ont payé pour moi.
Je ne redirai jamais assez à quel point les cadjins sont généreux et spontanés
(mais c'est très américain aussi).
Pis en rentrant,
mon danseur favori de mardi-gras m'a appelée et c'était bien plaisant on va dire
(si on excepte le fait que je sois absolument misérable au téléphone en anglais).
Ça me fait genre des papillons dans le ventre, If you see what I mean,
alors que je ne suis pas du tout cicatrisée...
C'est n'importe quoi.
De là à dire que l'histoire se répète,
il n'y a qu'un pas de valse..
Trois petits tours et puis s'en vont ?
Allez savoir...
En revanche lui, il a la check list complète,
deux miles de jardin composté en bord de lac (avec des serpents à sornettes sonnettes, plein et des moustiques plus féroces encore qu'en Louisiane... je savais pas que c'était possible...)
danseur de génie,
et randonneur très motivé par la campagne... française.
On va pas faire de pronostic hasardeux après un coup de fil,
mais disons que la Belgique n'a qu'à bien se tenir,
car le Tennessee lui, est au taquet !
C'est pas comme s'il n'y avait qu'un poisson dans l'étang n'est-il pas ?
La vie est faite de choix.
Partir ou rester .
Sourire ou pleurer.
Parader ou danser.
Il est temps que je vous raconte mon Mardi Gras,
puisqu'il est déjà passé et ne reviendra pas avant l'an prochain.
J'avais donc choisi d'aller à Lafayette,
parce que j'y ai une amie,
et que les amis c'est important,
surtout quand on est loin de chez soi.
Aussi parce que c'est une occasion d'aller chaque matin aligner 50 longueurs dans une piscine extérieure chauffée,
et que nager me manque beaucoup.
Et enfin parce que je ne me sentais pas d'être dans cette foule serrée à patienter longtemps,
après 2 heures de route (et retour ensuite).
Donc j'ai fait une croix sur les parades magiques et géantes de Nouvelle-Orléans,
où j'irai certainement l'an prochain,
et j'ai choisi un Mardi-Gras de danseurs.
King cake party géante
chez Gerry Sprangler
un sud africain qui a fait fortune dans les climatiseurs je crois,
et donc qui offre à ses invités un groupe de pros sous une halle à danser,
où tout est prévu,
même les mini étagères pour poser les boissons.
J'ai retrouvé avec plaisir Zydeco Joe,
93 ans,
l'accordéon, c'est bien bon...
J'ai adoré danser avec mon truc en plumes de Mardi Gras
Le lundi matin,
on était invitées à un petit déjeuner chez un type qui a construit sa maison tout seul
et ça m'a beaucoup impressionnée.
Il sait aussi cuire de la barbue (poisson chat) qui n'a pas un goût de vase,
et c'est presque plus impressionnant encore.
Le tout dans des poêlons de fonte,
qu'on utilise beaucoup icite.
Quelqu'un du reste m'en a prêté un (ça vaut une blinde) et franchement, c'est autre chose de cuisiner là dedans.
Notre hôte avait invité des copains d'enfance.
Il y en a un qui vient du Texas (lieu d'exil privilégié des Louisiannais en mal de travail)
et roule en voiture hybride.
Je découvre qu'il existe d'autres américains,
qui partagent les mêmes valeurs sociales que moi,
cuisinent ce qu'ils mangent,
et ont des sacs réutilisables dans leur coffre.
L'après midi, avec la brave petite hybride,
on est allés au
Fred's lounge à Mamou,
une place mythique de la danse ... et de mardi-gras.
Là j'ai eu la chance de faire la connaissance d'un danseur excellent que j'ai retrouvé le lendemain.
à Iota,
pour attendre, en dansant, l'arrivée du courir.
Le courir c'est une tradition qui vient de France.
Les mardis gras déguisés, guidés par leur capitaine, passaient de maison en maison demander la charité et récupérer de la nourriture pour faire un gombo géant le soir.
Aujourd'hui on lâche des poules qu'il faut attraper (en courant donc)
et qui ne sont pas à la noce
et dans ce coin là, ils imitent des chiens que l'on fouette...
Bon.
En arrivant en ville, ils demandent 5 sous, qu'on se fait un plaisir de leur lancer.
En fait, la meilleure place pour les courir,
c'est soit d'être dans la troupe des mardi-gras,
soit dans une maison où ils passent.
On peut dire aussi que dans un Etat très conservateur et traditionaliste comme la Louisiane,
Mardi-Gras c'est le moment où tout est permis ou presque,
y compris les blancs qui se déguisent en noirs (et les noirs en blancs...)
J'aurais bien voulu prolonger la journée à Eunice, paradis des danseurs,
mais mes covoitureurs n'étaient pas motivés.
J'ai quand même beaucoup dansé.
Maintenant j'ai à la fois la technique des pas et du groove,
et la stratégie pour trouver des danseurs,
autant dire que je ne m'ennuie pas.
D'ailleurs pour être franche,
j'ai bien apprécié mon petit fauteuil,
car oui,
moi aussi, pour la modique somme de 6 piasses,
je me suis offert le petit fauteuil pliant de festival,
qui présente au minimum l'intérêt de pouvoir poser tes affaires quand tu danses.
Tout est plus size aux Etats-Unis,
la Saint Valentin aussi.
Normalement, si tu te réveilles seule le 14 février,
tu réalises que les autres jours aussi,
personne ne t'aime (I mean dans le sens sexuel du terme j'entends...).
Mais pas icite.
Parce qu'icite, la Saint Valentin c'est aussi la fête de l'amitié,
ce qui tombe bien ,
vu que tous les mecs que je rencontre veulent être mon "ami",
en "tout bien tout honneur". Elle est pas bien faite la vie ?
C'est donc pour nos cousins américains,
le moment de s'échanger des petits cadeaux, essentiellement comestibles et sucrés,
comme c'est malheureusement trop souvent le cas aux Etats-Unis.
A l'école, les enfants viennent avec une boîte dans laquelle ils récupèrent tout ce qu'on leur offre.
Tu peux acheter une boîte ou un sac tout prêt,
mais souvent elles sont customisées et très réussies.
J'aime bien celle-ci, un peu pupute...
C'est tellement important qu'un des gamins de 3ème grade,
qui avait gagné une sortie bowling vendredi,
ne voulait pas y aller de crainte de rater le remplissage des boîtes.
Madame Nicole a donc proposé de garder les boîtes des absents,
et tout est rentré dans l'ordre.
Bien entendu,
madame Nicole avait sa propre boîte,
qui a été généreusement garnie...
(Comme à Noël, les parents ne m'ont pas oubliée et franchement, j'apprécie.)
Rassurez-vous, je ne mange pas tout
(en fait quasiment rien)
je mets les chocolats dans la boîte commune d'antidépresseurs,
et le reste à la disposition des dames de service,
qui elles ne reçoivent jamais rien.
Mes deux plus jolis cadeaux,
je les ai reçus de deux amis que j'apprécie particulièrement,
Dan, mon cavalier de compétition,
qui a pensé à ça
(dont j'avais envie depuis bien longtemps)
et un autre danseur européen cette fois,
qui m'a envoyé -entre autres- un cover de ça :
Quant à lui,
c'est bien dommage,
mais je m'en détache doucement,
j'apprends les silences, la patience,
mais aussi le renoncement,
parce qu'il faut bien.
Ah PimJ, comme dirait Cédille, ce fut une rencontre "intéressante, récréative, enrichissante et même "charmante",
mais c'est pas encore cette année que viendra celui que je n'attends plus, sa binette à la main, ses chaussures de marche aux pieds et son sac à dos arrimé...